26 November 2018 | Dave Bookless | 0 commentaires

Récit de deux typhons – et d’un ouragan

[tweet_dis]J’ai été réveillé par un éclair puissant et une détonation assourdissante malgré mes bouchons d’oreilles et mon masque sur les yeux. Une bombe ? Non, c’était le typhon Mangkhut[/tweet_dis] (nommé localement Ompong), la plus grosse tempête enregistrée dans le monde depuis le début de l’année [2018]. Il est passé bien au nord de Manille, mais une tempête large de 500 miles (800 km) a un impact immense. Le crash avait probablement été causé par un éclair frappant l’infrastructure électrique, car il fut suivi par une coupure de courant. Le matin suivant, des branches et des arbres tombés jonchaient étaient dispersés chaotiquement et les zones les plus basses étaient inondées, mais le métro de Manille avait été relativement épargné. Les habitants des Philippines sont habitués aux typhons: ils en subissent plus de 20 par année et disent en plaisantant que le système de dénomination par ordre alphabétique de ces tempêtes est redondant chez eux au vu de la quantité qu’ils en ont désormais.

Rétablissement après le typhon Mangkhut à La Mesa Eco Park, Quezon City, métro de Manille, Philippines

Rétablissement après le typhon Mangkhut à La Mesa Eco Park, Quezon City, métro de Manille, Philippines

 

Toutefois, Mangkhut n’avait rien d’une plaisanterie. Plus au nord, plus de 100 personnes ont perdu la vie, dont beaucoup dans les nombreux glissements de terrain aggravés par la déforestation et l’exploitation minière artisanale illégale. Des centaines de milliers d’habitations ont été endommagées et les ressources alimentaires qui devaient nourrir des millions de personnes cette année ont été détruites. Aux Philippines, les gens sont résilients. À Manille, les panneaux publicitaires ont été retirés en prévision, des arbres ont été replantés et l’électricité rebranchée en quelques heures, et une conférence sur  la protection de la Création, à laquelle j’ai participé en tant qu’orateur, s’est tenue comme prévue le matin après le passage de Mangkhut. Mais [tweet_dis excerpt=”La résilience a ses limites. À mesure que le climat se réchauffe, les tempêtes saisonnières se transforment en puissants ouragans et typhons et même la meilleure des préparations ne peut y répondre adéquatement, particulièrement si vous êtes pauvre. RT @arochaint”]la résilience a ses limites. Au fur et à mesure que le climat se réchauffe et fait augmenter la température à la surface des océans, les tempêtes saisonnières habituelles se transforment en puissants ouragans et typhons mortels et même la meilleure des préparations ne peut y répondre adéquatement, particulièrement si vous êtes pauvre[/tweet_dis]. Alors même que Mangkhut atteignait les Philippines, l’ouragan Florence déversait plus de 80 centimètres de pluie sur la Caroline, causant des dommages estimés à 38 milliards de dollars. Malgré les infrastructures modernes et les nombreux avertissements (Florence a eu une couverture médiatique bien plus grande, malgré une taille bien plus petite), même les États-Unis n’ont pas eu la résilience nécessaire  pour supporter la violence du chaos climatique.

Le typhon Mangkhut m’a touché d’une certaine manière personnellement. En juillet dernier, je me trouvais à Taïwan lorsque le typhon Nesat a balayé Taipei, causant des coupures de courant, des dommages structurels et l’annulation d’une prédication que je devais donner. Ma chambre d’hôtel se situait au 25e étage et je me suis senti très vulnérable lorsque tout le bâtiment s’est mis à grincer et que des débris volaient devant ma fenêtre. Il y avait également quelque chose d’ironique dans ma situation de « touriste du typhon » alors que j’avais voyagé pour parler de prendre soin de la Création, particulièrement parce que je suis parfaitement conscient que les émissions de CO2 de mon voyage contribuent aux causes sous-jacentes.

[tweet_box design=”default” float=”none”]Construire de communautés humaines résilientes au moyen des stratégies de développement traditionnelles est vain ; le défi que j’ai lancé lors de la consultation mondiale « Micah Global » était de repenser complètement ce que nous faisons.[/tweet_box]

J’étais avant tout aux Philippines pour une consultation Micah Global portant sur la résilience. L’audience comprenait 450 responsables chrétiens de près de 70 pays, la plupart travaillant pour des organismes de mission et développement. Dans ma présentation, j’ai insisté sur l’illusion de construire des communautés humaines résilientes en se basant sur les stratégies de développement traditionnelles. La nature perd rapidement sa résilience, avec un déclin de 67 % de la faune sauvages prévu d’ici 2020, avec une chute de plus de 50% du rendement des cultures dans les pays les plus pauvres d’ici 2050, et une augmentation rapide du stress hydrique, des inondations et des sécheresses extrêmes, de la déforestation et de la pollution de l’air, du sol et de l’eau. Le défi que j’ai lancé à mes collègues est de repenser complètement ce que nous faisons.

[tweet_dis]Nous devons reconnaître que sauver l’humanité n’est pas le seul chapitre de la grande histoire de Dieu, qui inclut les objectifs de Dieu pour la création tout entière[/tweet_dis]. Nous devons comprendre l’interdépendance complète qui nous lie à la création qui nous offre tant (ce qui est souvent décrit avec le terme stérile « services écosystémiques »). Nous devons prendre conscience que nous vivons dans un monde interconnecté, où notre mode de vie affecte nos prochains dans le monde entier, particulièrement les plus pauvres, et nous sommes tous confrontés à des choix difficiles  concernant le transport, l’alimentation, l’énergie et l’habillement. Nous devons être informés et responsables quant à ces choix et faire tout notre possible pour atténuer tout dommage (par exemple, A Rocha International compense tous ses vols via Climate Stewards). Soutenir l’Appel à la moisson pour la vie sauvage et les moyens de subsistance est un bon moyen de le faire.

Mon appel final était de vivre selon la « théologie des mangroves ». Elle se base sur Jérémie 29:4-7 où Dieu exhorte le peuple d’Israël à placer de profondes racines écologiques, sociales, économiques et spirituelles à Babylone, y compris planter des jardins et en manger les fruits. Je crois que Dieu appelle les chrétiens à être profondément enracinés dans les lieux et les communautés ou Il les a plantés. Les mangroves, que l’on trouve dans les régions tropicales du monde, ont une capacité extraordinaire de résilience  grâce aux interconnexions complexes de leur système racinaire qui retient le sol à l’interface entre la terre et la mer, prévenant ainsi l’érosion et créant un milieu propice à la vie, riche en nourriture et abris pour de nombreuses créatures différentes.

Alors que nous sommes confrontés à un monde toujours plus chaotique, nous avons besoin de communautés chrétiennes engagées à ralentir le rythme pour prendre le temps d’étudier et prendre soin des lieux et des gens là où Dieu les a plantés. Nous avons besoin de trouver un sens à notre vie et de nous épanouir, pas au travers de possessions jetables et de satisfactions immédiates, mais en cultivant des relations durables.

[tweet_box design=”default” float=”none”]Planter des arbres et en prendre soin doit être vu comme une façon de vivre comme un disciple.  Préserver l’intégrité des sols, des rivières, des récifs de corail et des forêts devrait être reconnu comme un appel missionnaire.[/tweet_box]

Typhoon Mangkhut at peak intensityNous ne serons peut-être pas capable d’arrêter la venue des typhons et des ouragans, mais en vivant avec plus de sagesse et d’humilité selon la parole de Dieu, nous pourrons contribuer à mitiger leurs pires effets, montrer de la solidarité avec les victimes de nos choix égoïstes, témoigner de ce qui est réellement important et devenir des phares rayonnant de lumière et d’espoir pour montrer qu’un chemin différent est possible.

Petite image: le typhon Mangkhut sur la  mer des Philippines à son pic d’intensité le 12 septembre 2018 (source). Image capturé par le satellite Himawari-8 de l’Agence Météorologique japonaise.

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Catégories: Histoires
Sur Dave Bookless

Dave Bookless : engagé à A Rocha depuis 1997, cofondateur (avec sa femme Anne) d’A Rocha Grande-Bretagne en 2001, il est actuellement Directeur pour la Théologie et les Eglises d’A Rocha International. Auteur et conférencier, il a une passion pour partager les enseignements de la Bible dans les cultures d’aujourd’hui. Il a participé à la rédaction de nombreux livres et a lui-même écrit «Planetwise – Dare to Care for God’s World» et «God Doesn’t do Waste». Il travaille à temps partiel à un doctorat de l’Université de Cambridge sur la théologie biblique et la sauvegarde de la biodiversité. Ayant grandi en Inde, il habite avec sa femme et ses 4 filles à Southall, une banlieue multiculturelle de Londres, où il partage le pastorat d’une église anglicane multiraciale et essaie avec sa famille de vivre de la manière la plus durable possible. Il est aussi ornithologue (bagueur certifié) et aime les oiseaux, les montagnes et les îles.

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