6 novembre 2017 | Chris Naylor | 0 commentaires

Quel est le bon moment pour parler du changement climatique ?

L’ouragan Irma s’avère être la tempête dont l’amplitude et la puissance ont battu tous les records. Tout au long de son parcours, depuis les Caraïbes jusqu’au sud-est des États-Unis, les communautés commencent à peine à accepter les destructions qu’il a causées. Voir les images satellites où Irma est aussi vaste que le Texas donne vraiment à réfléchir.

Mais la destruction des communautés et des habitats n’est pas tout ce qu’Irma a laissé sur son passage… un intense débat public a immédiatement commencé visant à déterminer si, à une époque comme la nôtre, on peut parler de changement climatique.

Caption: Cartographie des températures à la surface des océans, par la NASA. Plus l’eau est chaude, plus les ouragans sont puissants.

Certains, comme Scott Pruitt, directeur de l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA), ont considéré que c’était « déplacé ». Il n’a jamais caché son propre scepticisme sur le fait accepté par les scientifiques que, inévitablement, les activités humaines mènent vers davantage d’événements climatiques extrêmes comme Irma. D’autres, comme le Secrétaire d’État aux Affaires étrangères britannique, Sir Alan Duncan, s’en sont pris à la seule membre du Parlement britannique issue du Parti vert, Caroline Lucas, parce qu’elle suggérait que le temps était venu d’aborder la question plus large du changement climatique, prétendant qu’en « établissant un lien entre l’ouragan Irma et le changement climatique », elle « manquait d’humanité ».

L’inquiétude d’A Rocha alors qu’Irma s’approchait des États-Unis a été personnelle et immédiate : le responsable de notre équipe marine Bob Sluka et sa famille venaient d’emménager sur les côtes de Floride (vous pouvez découvrir ce qu’il a vécu en lisant cet article, L’attente de l’ouragan Irma). Et c’est bien de manière personnelle que, en tant que chrétiens et que concitoyens sur la même planète, nous devrions intervenir auprès de ces communautés qui ont été fortement meurtries par ces tempêtes véritablement dévastatrices — en partageant leurs peines, en leur tendant la main et en montrant notre amour. Les églises et les ONG sont, à juste titre, en première ligne pour fournir de l’eau propre, de la nourriture, un abri et tout ce qu’il faut dans une intervention coordonnée en cas de catastrophe. Mais alors que les inondations reculent, que les gens et les lieux entament leur convalescence, nous espérons aussi encourager l’émergence d’une conversation plus sage et dépolitisée sur le changement climatique. Celle-ci prend ses racines dans deux convictions chrétiennes. La première est que les personnes qui sont créées à l’image de Dieu ont pour mission sacrée de vivre par la vérité qui nous a libérés. La pratique d’une science honnête peut donc être une vocation sainte, toutes malvenues que soient les données sur les modes de vie que nous avions avant. Et la deuxième est une vocation égale à la précédente qui trouve son inspiration dans le Christ de prendre soin de la création dans son ensemble et des communautés humaines plus pauvres, soit ce qui est le plus vulnérable face aux effets d’un changement climatique qui évolue rapidement.

Des événements récents apportent encore plus de détermination pour mettre en pratique ces convictions. Cette année même, nous avons assisté aux inondations dans le sud de l’Asie où, d’après International Health Partners 1400 personnes ont perdu la vie et 40 millions d’autres ont été touchées par la montée des eaux ces deux derniers mois. Nous avons vu la vague de chaleur et les incendies qui ont causé un nombre de morts sans précédent au Portugal. Et dans le monde entier, plusieurs autres équipes A Rocha signalent des événements liés aux conditions climatiques extrêmes qui ont eu une incidence directe sur leur travail. On peut rapprocher de manière précise tous ces phénomènes aux prédictions des climatologues. Alors pour nous, il s’agit ici de compassion, de dire la vérité. Et parce que le problème est fondamentalement ancré dans le choix des sociétés humaines, elles-mêmes guidées par leurs connaissances et leurs croyances, notre première réaction est morale, elle n’est pas politique.

Nous sommes fiers d’accueillir la grande climatologue Katharine Hayhoe à Londres pour une conférence le soir du 16 novembre (tickets, en anglais). Récemment, elle a soutenu au New York Times que « lorsque l’on tente d’alerter les gens sur les risques, ça n’est pas une accroche intéressante pour les médias. Personne ne veut écouter. C’est pour ça que le moment d’en parler, c’est maintenant. Avec le changement climatique, le mythe le plus dangereux et le plus pernicieux que nous avons décidé de croire n’est pas qu’il n’existe pas, ou que les humains ne sont pas responsables ; c’est le mythe selon lequel pour moi, ça n’a pas d’importance. En tant qu’humains, nous excellons dans l’art de faire semblant qu’un risque, même si nous savons qu’il existe bel et bien, n’a pas d’importance pour nous. »

Alors nous croyons que le bon moment est venu de parler du changement climatique et qu’il faut agir pour protéger les gens et les espèces non humaines de ses effets immédiats. Nous croyons aussi qu’une meilleure conversation est possible, que celle-ci devrait être accueillie les bras ouverts par ceux qui s’engagent à connaître la vérité qui nous libère, et qu’il faut trouver cette vérité par tous les moyens possibles.

Êtes-vous d’accord ?

Traduction : Nadia Pazolis-Gabriel

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Catégories: Questions
Sur Chris Naylor

Avant de rejoindre A Rocha, Chris s’est forgé une large expérience dans l’enseignement des sciences et la gestion d’écoles au Royaume-Uni et au Moyen-Orient, un parcours durant lequel il étudia également à l’Institut Biblique et apprit l’Arabe (en Jordanie). Il a rejoint l’association A Rocha en 1997 et occupé jusqu’en 2009 le poste de Directeur d’A Rocha Liban, dont il est le cofondateur. Il supervisa le programme de restauration de la zone humide d’Aammiq, le développement du projet d’éducation à l’environnement et le programme scientifique d’études de terrain qui a permis d’identifier 11 nouvelles zones d’importance pour la conservation des oiseaux. Depuis avril 2010, il occupe le poste de Directeur Exécutif d’A Rocha International et est basé à Oxfordshire. Son livre, Cartes postales du Moyen-Orient : Comment notre famille s’est prise d’amour pour le monde arabe, a été publié aux éditions Lion Hudson en mars 2015.

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