9 October 2018 | Dave Bookless | 0 commentaires

Théologie du plastique

L’année 2018 a vu un extraordinaire changement d’opinion et d’attitude du public face au plastique, particulièrement le plastique à usage unique… au moins dans la plupart des riches pays occidentaux. Beaucoup estiment que l’élément déclencheur a été la série TV de la BBC Blue Planet 2 de David Attenborough, une association d’images époustouflantes de merveilleuses créatures sous-marines et  de l’épouvantable fléau du plastique dans les océans. Ces déchets plastiques sont, d’une part, ingérés par la faune sauvage, causant une mort lente par la famine, et d’autre part, ils s’accumulent en minuscules granulés et en immenses îles formées de tourbillons de plastique dans les lieux les plus reculés de la planète. Depuis cette prise de conscience, un groupe Facebook Plastic-less Living (Moins de plastique au quotidien) avec actuellement plus de 3000 membres est né d’un simple défi de Carême, Starbucks et d’autres sociétés ont banni les pailles en plastique et plusieurs pays ont complètement interdit les sacs plastiques à usage unique. Pour ceux qui pensent qu’il s’agit d’une mode passagère des riches pays occidentaux, il est intéressant de constater que [tweet_dis excerpt=”#LeSaviezVous Le premier pays à bannir complètement les sacs plastiques a été le Rwanda”]le premier pays à bannir complètement les sacs plastiques a été le Rwanda[/tweet_dis].

Coffee capsule - Júlio Reis

Les chrétiens ont été au cœur de l’activisme des consommateurs contre le plastique (parmi de nombreux autres), mais en effectuant des recherches en ligne, j’ai constaté qu’il existe très peu de réflexion théologique sur la place qu’a pris le plastique dans nos vies. Et, si cela prête à confusion, [tweet_dis excerpt=”L’expression « théologie du plastique » ne signifie pas ici une théologie bon marché, jetable et de mauvais goût !”]l’expression « théologie du plastique » ne signifie pas ici une théologie bon marché, jetable et de mauvais goût ![/tweet_dis] Je souhaite faire réfléchir sur le pouvoir spirituel et l’importance de quelque chose qui n’est présent que depuis très peu de temps dans l’histoire de l’humanité, mais est cependant devenu si omniprésent que nous en sommes désormais tous dépendants.

La théologie commence avec Dieu le Créateur, donc notre point de départ est que les matières premières avec lesquelles est fabriqué le plastique font partie de la « très bonne » création de Dieu. [tweet_dis]Le plastique est remarquable de par sa flexibilité infinie et sa quasi inertie chimique, et a trouvé sa place dans presque tous les domaines de la vie moderne[/tweet_dis]. Tout comme le pain et le vin au cœur de la Sainte Communion, le plastique est le « fruit de la terre et l’œuvre des mains de l’homme » [1].

[tweet_box design=”default” float=”none”]Le plastique n’est pas mauvais en soi, mais ses usages et l’étendue de son utilisation peuvent l’être.[/tweet_box]

Toutefois, ce n’est pas la fin de l’histoire. Le pain peut moisir ; et peut symboliser l’inégalité et l’injustice. On peut jouir du vin jusqu’à la démesure. Il en va de même avec le plastique : il n’est pas mauvais en soi, mais ses usages et l’étendue de son utilisation peuvent l’être. Aujourd’hui, le plastique aujourd’hui, et particulièrement le plastique jetable à usage unique, est devenu le symbole de notre désir de confort immédiat, notre addiction à vouloir plus de choses et les plus récentes, notre réponse instinctive primaire aux signaux publicitaires, notre dépendance à la technologie, et notre production inconsidérée de déchets. Tous ces comportements sont les symptômes d’une profonde maladie psycho-spirituelle et la dislocation de ce que signifie être réellement  humain. Nous avons été créés pour être en relation avec Dieu, nos semblables, la création et nous-même. Cependant, la manière dont nous utilisons le plastique met à mal toutes ces relations. Laissez-moi vous expliquer…

Le plastique est au cœur de notre culture de consommation matérialiste qui tend à réduire Dieu à une expérience personnelle de bien-être spirituel et ignore les faux dieux que nous adorons véritablement : le confort, le plaisir, l’épanouissement personnel, et la satisfaction immédiate. Tout comme les déchets plastiques que nous jetons et oublions, nous ignorons les passages bibliques qui nous mettent au défi de renoncer à nos luxes [2] et chercher d’abord le Royaume de Dieu [3]. De même, la fabrication et l’élimination de nombreuses matières plastiques impliquent des carcinogènes connus [4] qui nuisent à notre propre santé et particulièrement à celles des plus pauvres qui vivent plus souvent à proximité d’usines chimiques et manipulent des matériaux toxiques. Pourtant, comme avec le tabac et le changement climatique, les entreprises les plus puissantes et les plus riches minimisent et nient les risques, un exemple flagrant des principautés et puissances démoniaques  [5] qui sont à l’œuvre dans le monde d’aujourd’hui. Et comme pour la création de Dieu, nous voyons maintenant les résultats de notre indulgence coupable face aux impacts dévastateurs sur la vie sauvage dans le monde entier. Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a récemment déclaré : « [tweet_dis]Notre monde est envahi par les déchets plastiques nocifs. Des îles les plus reculées jusqu’au pôle Nord, aucune région n’est épargnée. Si la tendance actuelle se poursuit, il y aura en 2050 plus de plastique que de poissons dans les océans.[/tweet_dis] »

En outre, la grande majorité du plastique est faite de polymères et monomères pétrochimiques dérivés du pétrole et du gaz naturel (bien qu’il puisse également être fabriqué à partir de plantes). Ainsi, une théologie du plastique doit questionner plus profondément notre utilisation des énergies fossiles et leur impact sur le changement climatique et la pollution de l’air, du sol et de l’eau.

Tout comme le chemin vers une vie avec de moins en moins de plastique est long et tortueux, le développement d’une « théologie du plastique » demandera bien plus qu’un court billet de blog comme celui-ci. Mais la clé est de démarrer et de ne pas s’arrêter lorsque les difficultés surviennent. Et, puisque pour moi le meilleur endroit pour faire de la théologie est dans le contexte de la louange et de la communauté, priez pour que Dieu vous révèle sa volonté concernant la place du plastique dans votre vie et continuez à aborder la théologie du plastique dans votre petit groupe et à l’église. Je serai bien sûr ravi de recevoir vos commentaires, ce blog n’étant pas destiné à être à usage unique.

Note de bas de page :

[1] Cette phrase est tirée d’une bénédiction juive et utilisée dans les liturgies catholiques et certaines liturgies anglicanes pendant l’Eucharistie/ la Sainte Communion.

[2] par ex. Matthieu 19:16–26

[3] Matthieu 6:33

[4] Brandt-Rauf PW, Li Y, Long C, Monaco R, Kovvali G, Marion M-J. (2012) Plastics and carcinogenesis: The example of vinyl chloride. Journal of Carcinogenesis. 2012;11:5. doi:10.4103/1477-3163.93700.

[5] Éphésiens 6:12

Traduction : Valérie Coudrain

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Catégories: Réflexions
Mots clés: plastique théologie
Sur Dave Bookless

Dave Bookless : engagé à A Rocha depuis 1997, cofondateur (avec sa femme Anne) d’A Rocha Grande-Bretagne en 2001, il est actuellement Directeur pour la Théologie et les Eglises d’A Rocha International. Auteur et conférencier, il a une passion pour partager les enseignements de la Bible dans les cultures d’aujourd’hui. Il a participé à la rédaction de nombreux livres et a lui-même écrit «Planetwise – Dare to Care for God’s World» et «God Doesn’t do Waste». Il travaille à temps partiel à un doctorat de l’Université de Cambridge sur la théologie biblique et la sauvegarde de la biodiversité. Ayant grandi en Inde, il habite avec sa femme et ses 4 filles à Southall, une banlieue multiculturelle de Londres, où il partage le pastorat d’une église anglicane multiraciale et essaie avec sa famille de vivre de la manière la plus durable possible. Il est aussi ornithologue (bagueur certifié) et aime les oiseaux, les montagnes et les îles.

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